La SEZ : Société d’Ethnozootechnie

Des dépêches de mai et juin du site agrimutuel à consulter sur : www.agri-mutuel.com

publié le 25 juin 2020

Autonomie protéique des élevages : véritable enjeu de la filière ?

Un débat sur ce thème a été organisé lors du Salon de l’agriculture de Nouvelle-Aquitaine ; Qu’en retenir. ( résumé dépêche TNC 26/05).
Face à la volatilité des marchés ou encore la demande sociétale, l’autonomie protéique est un enjeu de taille pour l’élevage français a expliqué Sylvain Pellerin, directeur de recherche à l’Inrae de Bordeaux.

Un constat  : L’élevage français présente un déficit de matières riches en protéines de l’ordre de 50 %. Même si la France reste mieux placée par rapport aux autres pays de l’UE, le déficit perdure malgré les divers plans de relance, les surfaces en protéagineux restent trop faibles, tout comme celle des légumineuses fourragères pures. Forcément, ce déficit est compensé par les importations, notamment de soja en provenance d’Amérique du Sud, mais cela pose problème : « L’élevage français est alors vulnérable à la volatilité des cours. En plus, cette entrée massive d’azote importé crée des situations locales d’excédents d’azote génératrices de fuites vers l’environnement. Autre point non négligeable : cette demande croissante en protéines contribue à la déforestation. »

Elevage et cultures duo gagnant  : Sylvain Pellerin rappelle aussi que l’élevage produit des effluents riches et utilisables comme engrais, se substituant ainsi aux engrais de synthèse. « Le problème est que l’évolution de l’agriculture a conduit à des spécialisations par régions de productions (régions d’élevage versus régions de grandes cultures), avec une concentration croissante des élevages. » Pour le directeur de recherche, il est urgent de relocaliser les productions végétales destinées à l’alimentation animale (protéagineux, légumineuses, méteils). Il faut aussi travailler plus largement à l’échelle du territoire en développant les échanges de matières (aliments, paille, effluents), de surfaces ou d’animaux.

Nos élevages ne gaspillent pas les protéines consommables par l’Homme : Autre sujet qui alimente le débat : « Beaucoup affirment qu’il est préférable de consommer directement les ressources végétales, sans passer par l’élevage, car les animaux en gaspillent une partie. « Attention beaucoup de protéines consommées par les animaux ne sont pas valorisables par l’Homme. » explique Guillaume Durand, maître de conférences à Bordeaux Sciences Agro. Il faut regarder l’efficience protéique nette des élevages, qui met en relation les protéines consommables par l’Homme et celles uniquement valorisables par les animaux. Et dans la plupart des cas, « les élevages sont producteurs nets de protéines : ce ne sont pas des gaspilleurs. » Cela est d’autant plus vrai dans les systèmes à potentiel agronomique faible : « Ce sont les animaux qui permettent de produire le plus de protéines par unité de surface, pas les cultures. » Les systèmes herbagers sont ceux où l’autonomie est la plus facile. De plus, les prairies rendent beaucoup de services écosystémiques, comme le stockage du carbone, un abri pour la biodiversité, le pâturage, etc. »
Bien-sûr, tous les élevages ne peuvent pas baser leur système sur l’herbe. Dans ce cas, le chemin vers l’autonomie se fait soit via les fourrages cultivés, soit par la production locale de céréales et protéagineux. De son côté, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a lui aussi demandé un Plan Protéines pour la France. (dépêche AFP 29/05).

Souveraineté alimentaire et diversification territoriale

Avec le retour en force du concept de souveraineté alimentaire, l’idée de la relocalisation de la production, notamment agricole, fait partie de tous les plans de relance proposés par les organisations agricoles ou politiques. Ce sujet a été abordé le 17 juin, par Gilles Lemaire, directeur de recherche honoraire à l’Inra, à l’occasion d’un webinaire organisé par l’Académie d’agriculture et Agreenium autour de la territorialisation de l’alimentation,
Principaux points de son intervention : « La souveraineté dépend d’une diversification des productions. Cette diversification est d’ailleurs une nécessité, si l’on veut concilier deux objectifs aujourd’hui contradictoires, la sécurité alimentaire pour nourrir une humanité croissante, et la protection de notre environnement ». La simplification et l’uniformisation excessive de la production agricole « a été imposée par le paradigme des économies d’échelle, qui a conduit à la spécialisation avec un objectif de réduction des coûts de production ; mais ces systèmes de production trop simplifiés ont eu des conséquences environnementales et agronomiques négatives. Plus globalement « une des clés essentielles de la diversification d’un système de culture, c’est le maintien de l’association agriculture-élevage », insiste Gilles Lemaire. Cependant, elle n’est pas toujours possible au sein de l’exploitation agricole, qui n’est plus « l’unité métabolique adéquate ». Il faut donc organiser et optimiser les échanges au sein des territoires. Territoire vu comme un « hyper agro-système composé d’entités spécialisées échangeant entre elles des flux de matières et de services. Mais même au niveau territorial, pour un certain nombre de raisons, l’autonomie totale restera quoiqu’il en soit utopique. (résumé de la dépêche AFP 18/06).
De son côté, le ministre de l’agriculture, Didier Guillaume, a annoncé jeudi 18 juin la tenue d’une conférence sur la souveraineté alimentaire « à l’échelle européenne », à Paris lors de la rentrée prochaine. (dépêche AFP 18/06).

Filière Lait bio

Si les deux premières vagues de conversions dans la filière laitière biologique étaient surtout le fait de la production, la troisième vague, qui intervient depuis 2016, est soutenue aussi par la transformation et l’aval de la filière, signe d’un véritable changement d’échelle qui ne va pas sans susciter d’interrogations quant au modèle de développement souhaitable à l’avenir.
Partant de 1 % de la collecte laitière nationale en 2008, la collecte de lait de vache bio a dépassé la barre des 4 % en 2019, et le milliard de litres collecté sur 12 mois a été dépassé en mars 2020, soit deux fois plus qu’en 2014.
Près de 88 000 vaches laitières supplémentaires ont été converties entre 2015 et 2018 (ou sont encore en conversion), portant leur total à un peu plus de 220 000, soit 6 % du cheptel laitier national. Les livraisons restent concentrées dans l’Ouest, la Bretagne et les Pays de la Loire étant les deux régions les plus productrices, représentant 41 % de la collecte nationale avec respectivement 176 et 172 millions de litres de lait livrés en 2018. Les trois quarts de la collecte de lait bio sont réalisés par quatre opérateurs : Biolait en tête, suivi par Lactalis, Sodiaal et Eurial.
En 2019, le prix moyen du lait biologique payé aux livreurs toutes primes et qualités confondues aurait atteint 476 €/1 000 litres en moyenne, une progression de près de 8 € par rapport à l’année 2018. Depuis 2015, l’écart de prix avec le lait non bio est resté supérieur à 100 € / 1 000 litres. (dépêche TNC 29/05).

Ours et pastoralisme

Une enveloppe de 500 000 euros supplémentaires a été allouée à la cohabitation des activités de pastoralisme avec la présence des ours dans le massif des Pyrénées, ont annoncé jeudi les ministres de la transition écologique et solidaire et de l’agriculture dans un communiqué commun. Ce demi-million d’euros ira notamment « à la protection des troupeaux, notamment pour l’équipement de cabanes dans les estives, le renfort de bergers d’appui, ainsi que la mise en place de diagnostics pastoraux et d’analyses de vulnérabilité », selon le communiqué. Le nombre d’ours dans les Pyrénées atteint désormais les 50 individus, niveau qui n’assure toutefois pas la survie de l’espèce. En 2019, 1 173 animaux ont été tués par des ours et 36 ruches détruites, selon les chiffres contenus dans une consultation publique lancée récemment pour des mesures d’effarouchement des ours bruns dans les Pyrénées.
Par ailleurs, un ours brun a été retrouvé mort début juin en Ariège, portant des traces de tir par balle, il devait être autopsié à l’école vétérinaire de Toulouse. Plusieurs dizaines de personnes se sont rassemblées samedi 20 juin devant la préfecture de Foix (Ariège) en hommage à un ours tué dans les Pyrénées, (dépêches AFP 05, 10 et 21/06).

Loup

Réuni à Lyon le 8 juin, le groupe national loup n’a pas rassuré les éleveurs du CAF loup (FNSEA, JA, FNO, FNB, FNC et APCA). Avec une population de loups estimée à 580 animaux contre 530 l’hiver passé, « la pression de la prédation est plus forte et lourde de conséquences pour les éleveurs », rappellent les organisations qui précisent que « ce comptage est vraisemblablement en dessous de la réalité ». (dépêche TNC 09/06).

Prix des terres 2019

Dans un contexte morose, marqué par la baisse des résultats agricoles, le marché des terres et prés libres a été particulièrement dynamique en 2019 avec 94 450 transactions (+4%) pour 424 100 ha échangés (+4,9%).
Le prix des terres est resté stable, à 6 000 €/ha. Les prix diffèrent cependant en fonction des productions agricoles. Dans les zones de grandes cultures, en hausse en 2018, les prix marquent un repli de – 3,3 % en 2019 et s’établissent en moyenne à 7 290 €/ha. En revanche, ils remontent de + 2,1 % dans les zones d’élevage bovin, pour un prix moyen de 4 670 €/ha. Malgré cette hausse de prix dans les zones d’élevage, la FNSafer tient à alerter sur le recul des exploitations d’élevage. « Il y a un risque de raréfaction des repreneurs, sachant que dans certaines zones, des exploitations ne trouvent déjà pas de repreneurs. Plusieurs freins contribuent à cette situation : « normalisation » de la vie des agriculteurs, qui aspirent à plus de temps libre, coût des mises aux normes et taux d’immobilisation élevés, parallèlement à une incertitude vis-à-vis des revenus et à de nouvelles exigences sociétales. Or, cette disparition des exploitations d’élevage se fait en partie au profit des exploitations de grandes cultures, avec un recul surtout marqué en zone de plaine, là où les conditions agronomiques font que les prairies peuvent être retournées, et où la valorisation du lait est moindre. Cette disparition des exploitations d’élevage au profit des exploitations de grandes cultures accentue en partie un phénomène de concentration , que risque également de renforcer la forte augmentation des transactions par transferts de parts de sociétés.
En 2019, ces transactions de parts sociales ont représenté 1,2 milliard d’euros « en dehors de toute régulation », explique la FNSafer ; le droit de préemption de la SAFER ne s’applique que dans le cas de cessions totales. « Pour avoir une autonomie alimentaire, une agriculture de proximité avec une forte valeur ajoutée, comme semble l’exiger la crise que l’on vient de subir, il faut une forte régulation de tous les marchés fonciers », demande Emmanuel Hyest, qui attend toujours la loi foncière promise, « ou en tout cas des outils de régulation » pour assurer la transparence des marchés fonciers (dépêche TNC 01/06).

Loi foncière

Espérée par de nombreux acteurs du monde agricole pour réguler l’accès aux terres, ne verra « probablement » pas le jour d’ici à la fin du quinquennat, faute de temps, a déclaré le ministre de l’agriculture Didier Guillaume. « Tout ce qui pourra être pris par décret, par arrêté, de façon règlementaire, nous le prendrons », a-t-il ajouté, évoquant des sujets cruciaux pour l’avenir de l’agriculture tels que le statut du fermage, l’installation des jeunes, ou « les sociétés capitalistiques qui achètent des terrains » : « il est hors de question de reculer sur le sujet », a-t-il affirmé. (dépêche AFP 11/06).

Installation-Transmission

Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a présenté un avis, mardi 9 juin 2020, sur l’installation et la transmission, avec l’objectif de « stopper l’hémorragie du monde agricole ». DJA jusqu’à 50 ans, suppression des aides Pac après l’âge de 70 ans, révision des dispositifs fiscaux, création d’une indemnité viagère de transmission pour compléter des retraites agricoles à revaloriser, l’institution insiste sur l’indispensable refonte des politiques d’accompagnement financier et humain des cédants et repreneurs d’exploitation. Les syndicats agricoles ont accueilli favorablement, dans l’ensemble, ces propositions. Certains points cependant ne font pas l’unanimité, en particulier l’accès à la dotation jeune agriculteur jusqu’à 50 ans auprès notamment de Jeunes agriculteurs, de la FNSEA et des chambres d’agriculture. (dépêches TNC 12 et 16/06).

Accord libre échange

L’Union européenne est dans l’embarras après un vote début juin du Parlement néerlandais contre l’accord commercial controversé conclu il y a près d’un an avec le Mercosur, compliquant un peu plus sa ratification par l’ensemble des États membres. (dépêche AFP 04/06)

Accords commerciaux

Dans un texte commun, les éleveurs de ruminants français demandent à la Commission européenne de mettre fin à sa politique « effrénée » de conclusion d’accords de libre-échange incluant le secteur agricole dans les négociations.« Parce que sans éleveurs en France et en Europe, demain, il n’y aura pas de souveraineté alimentaire, les produits d’élevage doivent être systématiquement exclus de ces négociations », a rappelé le 5 juin l’Alliance des éleveurs de ruminants, rassemblant les éleveurs français de bovins, d’ovins et de caprins, dans un communiqué dénonçant la « folie libre-échangiste » de la Commission européenne. (dépêche TNC 08/06)

Des vers de farine pour nourrir les animaux autrement

De la larve à la croquette pour chiens : une filière d’élevage de vers destinés à la nourriture pour animaux a vu le jour en Auvergne. Nourris au son de blé et aux graines de légumineuses, soixante millions de vers sont élevés à une température de 26°C et un taux d’humidité de 65%, puis « récoltés », avant d’être déshydratés dans un micro-onde géant. Une partie est vendue sous cette forme pour nourrir les poules des particuliers, une autre est transformée en croquettes pour chiens et chats par l’intermédiaire d’une entreprise locale. L’objectif est de fournir à terme les éleveurs de poissons et de volailles de la région, avec une production de 15 tonnes de vers par an. . (dépêche AFP 04/06)